Article paru dans la Revue de l’AMOPA
Voir les participants au séminaire sur la page « Allemagne « de ce site
Séminaire sur la promotion du français dans les pays de langue allemande
à Berlin les 16 et 17 avril 2015 – Rapport
A l’initiative de l’AMOPA Norvège, Finlande et Allemagne du Nord, un séminaire sur la promotion du français, le premier de son genre en Allemagne, a été organisé à Berlin à l’Institut français à Kurfürstendamm 211 les 16 et 17 avril 2015.
Un séminaire similaire, d’envergure plus modeste, a eu lieu à l’Institut français d’Oslo en septembre 2013 pour un petit groupe d’experts de promotion et d’enseignement du français. Le but principal en était la discussion de la raison d’être et d’un éventuel développement du site internet http://pourlefrancais.com, créé par l’AMOPA Norvège et Finlande et géré par Mme Claude Anttila. Pendant ce séminaire, il a été proposé que des sections de l’AMOPA de l’étranger organisent des séminaires analogues dans d’autres pays, rassemblant des personnalités clés de la promotion de la langue et de la culture françaises. En accord avec Mme Christine Kaiser, présidente de l’AMOPA Allemagne du Nord, Berlin a ensuite été choisi comme lieu de rencontre pour le deuxième séminaire. Les initiateurs du séminaire de Berlin ont voulu une rencontre légèrement différente, plus polyphone que celle d’Oslo, en raison de l’importance des pays de langue allemande dans le paysage linguistique, culturel et politique européen et leur proximité par rapport à la France. Le site finno- norvégien a donc tenu un rôle moins important, et plus de temps a été consacré à d’autres actions de promotion de la langue et de la culture françaises.
En raison de ceci, la préparation du séminaire, sous la responsabilité de M. Rolf Tobiassen de l’AMOPA Norvège, a été une collaboration internationale entre plusieurs instances : les associations de l’AMOPA Norvège, Finlande, Allemagne du Nord et Suisse, l’Ambassade de France à Berlin par son attaché fédéral de coopération pour le français, l’Institut français de Berlin, et l’Association des professeurs de français de Berlin. Les AMOPA Autriche et Allemagne du Sud ont été invitées à y participer, mais pour des raisons diverses elles n’ont pas été en mesure de le faire. L’Organisation Internationale de la Francophonie a également été invitée, mais n’a pas pu y assister. Pourtant, l’OIF a envoyé du matériel sur la francophonie et a invité à une coopération future.
Déroulement du séminaire
Premier jour :
33 personnes se sont inscrites à ce séminaire de deux jours qui a commencé le 16 avril par une réunion publique de 14h00 à 18h00. Le 17 avril un groupe plus restreint s’est réuni pour une discussion de deux heures (10h00 à 12h00) sur la base de ce qui avait été présenté la veille.
La séance du 16 avril a été ouverte par des mots de bienvenue de la présidente de séance, Mme Christine Kaiser , au nom des associations AMOPA de l’étranger, et puis par Mme Corinna WESCHE, Senatsverwaltung für Bildung, Jugend und Wissenschaft, M. Emmanuel SUARD, COCAC de l’Ambassade de France en Allemagne, et un message de M. Michel Berthet, Président de l’AMOPA France, lu par M. Tobiassen.
Mme WESCHE, félicitant le choix de Berlin pour ce séminaire, a souligné la dimension politique de l’enseignement du français en Allemagne, et elle a énuméré les différentes activités liées au français, la langue du partenaire.
M. SUARD, de son côté, après avoir remercié les initiateurs pour avoir organisé un tel séminaire, a accentué le côté utilitaire, pratique et économique du français dans l’Europe d’aujourd’hui, une langue qui n’est plus la langue d’élite d’autrefois et ne devrait plus être enseignée comme telle. Pour attirer les jeunes, dans une société multilingue comme l’Allemagne, il faudrait une motivation pratique, et il faudrait également tenir compte de la diversité du public. Il a donné comme exemple le sport, auquel les jeunes s’intéressent.
M. TOBIASSEN a lu le message de Michel Berthet, remerciant les associations AMOPA de l’étranger de l’initiative du séminaire. Vu la menace de la réduction de l’importance du français dans certaines régions du monde, il insiste sur la pertinence de cette action, en citant des réflexions de Carlos Fuentes sur la richesse de la langue.
Ensuite, il y a eu les interventions suivantes :
1. Rolf TOBIASSEN, Membre du Bureau de l’AMOPA Norvège, Membre du CA de l’AMOPA France : Pourquoi ce Séminaire ?
M. Tobiassen, qui travaille depuis de nombreuses années pour la promotion du français, précise que ce séminaire a été conçu comme un lieu prévilégié pour étudier la promotion du français langue étrangère, l’Allemagne étant sur ce point un pays particulièrement intéressant. Un séminaire est un lieu pour partager et semer des idées et pour avoir des discussions entre experts, et dans ce cas, entre autres sur le site internet finno-norvégien. Pour lui, l’apprentissage d’une langue étrangère est, en définitive, une action pour la paix.
2. Arnaud SÈTE, Attaché fédéral pour la coopération et le français, Ambassade de France en Allemagne : La politique de « la langue du partenaire » et l’importance du Traité de l’Elysée de 1963 pour la promotion du français http://www.france-allemagne.fr/Traite-de-l-Elysee-22- janvier-1963,0029.html
Dans sa présentation sur Le Traité de l’Elysée, M. SÈTE a rappelé les raisons politiques de l’approche entre la France et l’Allemagne et l’apprentissage de « la langue du partenaire ». Il a souligné la réciprocité entre l’enseignement du français en Allemagne et de l’enseignement de l’allemand en France. Il a mis l’accent sur la stabilité du choix du français comme deuxième langue étrangère après l’anglais, tout en montrant, par une carte illustrée, la différence entre les Länder, avec 60,8 % en Sarre et 11,7 % en Brême. Le français est en concurrence avec le latin, et en Brême et Hambourg avec l’espagnol.
Il a énuméré les nombreuses instances qui travaillent, en collaboration avec les Instituts Français, pour la promotion de la langue et de la culture du partenaire, et leurs activités: Au niveau fédéral, le plénipotentiaire chargé des relations franco-allemandes, l’OFAJ (Office Franco-Allemand pour la Jeunesse), ensuite les Kitas (jardins d’enfants) franco-allemands, l’enseignement bilingue, classes bilangues, l’Abibac (obtention simultanée des deux diplômes Abitur et Baccalauréat), l’Université franco-allemande, Campus France, Cinéfêtes, FranceMobil/DeutschMobil, l’Association de professeurs de français etc. Sa conclusion a été que, pour la promotion du français, il faut continuer à faire ce qui marche bien, il faut apprendre de ce que font les autres et il faut miser plus sur le numérique.
3. Anne JARDIN, Chef de bureau adjointe de l’Office Franco-Allemand pour la Jeunesse : Les programmes de l’OFAJ promouvant le français
Mme Jardin a précisé que la mission de l’OFAJ, créé peu de temps après la signature du Traité de l’Elysées en 1963, est tout d’abord d’œuvrer pour une compréhension mutuelle des deux partenaires. L’apprentissage de la langue du partenaire est venu en second lieu. Ensuite, Mme Jardin nous a donné un aperçu de l’énorme dimension des actions et des activités de l’OFAJ : échanges scolaires et préscolaires, stages et échanges professionnels, rencontres de divers types, cours de langue, jumelages, bourses etc. Comme exemple d’actions linguistiques, elle a mentionné les glossaires d’OFAJ. Pour faciliter la communication linguistique dans différents domaines de la vie pratique, OFAJ a financé l’élaboration des glossaires bilingues franco-allemands, sur cd ou téléchargeables, aussi sous forme d’applications pour les téléphones portables. Depuis 1963, 8 millions de jeunes Français et Allemands entre 3 et 30 ans ont profité des programmes financés par OFAJ, qui dispose d’un budget considérable. En 2014 le budget, venant des gouvernements des deux pays, était de 24,2 millions d’euros. http://www.ofaj.org
4. Kristine DEHARDE, Vice-présidente de la VdF Berlin (Association des professeurs de français de Berlin) : Les tables rondes de VdF Berlin sur la promotion du français.
Mme DEHARDE a expliqué comment, à l’aide des réunions appelées « tables rondes », les professeurs de français de Berlin rencontrent, tous les trois mois un certain nombre d’instances, pour échanger des idées sur la promotion du français, s’informer mutuellement et de présenter du matériel de promotion et d’enseignement. Les instances suivantes ont été citées : l’Ambassade de France, l’Institut Français de Berlin et de Brandebourg, le Sénat, FranceMobil, OFAJ, KLETT.
5. Christophe ZIMMERLI, Président de l’Association Suisse des Professeurs de Français
(ASPF) : La promotion du français langue étrangère en Suisse.
M. ZIMMERLI a expliqué la situation particulière de la Suisse, un petit pays divisé en 26 cantons avec une grande autonomie et ayant quatre langues nationales, dont le français. Il n’y a pas de politique unifiée, même si les Suisses ont depuis 2010 une loi sur les langues qui règle un plurilinguisme individuel avec priorité aux langues nationales. La situation économique liée à cette législation mène à une discussion que M. Zimmerli qualifie de « la guerre des langues ». Il est difficile de faire la promotion d’une seule langue en Suisse, et la promotion du français est laissée aux associations bénévoles et à l’initiative personnelle.
6. Émilie GIRARD : Le programme « FranceMobil » au service de la promotion du français. Mme Girard nous a présenté le programme FranceMobil qui, depuis 2002, se sert de moyens non traditionnels de promotion du français. Dans ce programme, sponsorisé par Robert Bosch Stiftung et la compagnie automobile Renault, douze jeunes animateurs venant de France parcourent les routes allemandes au bord des voitures Renault Kangoo. De cette manière, ils ont réussi à visiter 11300 écoles et presque un million d’élèves. Comme la fondation Robert Bosch a servi essentiellement à déclencher le programme, FranceMobil va dorénavant être financé par l’OFAJ. Un programme similaire, le DeutschMobil, est établi en France.
7. Claude ANTTILA, Présidente de l’AMOPA Finlande, présente le site internet http://pourlefrancais.com, réalisé par les associations AMOPA Norvège et Finlande, et invite à une discussion sur son développement et sa diffusion
Après une pause-café, Mme Anttila a d’abord donné une présentation générale du site en expliquant qu’il s’adresse en premier lieu aux professeurs de français, et que, jusqu’à maintenant, seuls quelques textes s’adressent directement aux jeunes. Elle a ensuite montré la structure de ce site que l’on pourrait qualifier de banque de données sur la France et la francophonie. Elle a illustré sa présentation par des exemples qui ont bien montré la richesse et la variété des informations qui s’y trouvent réunies. Elle a invité l’audience à l’aider dans le développement futur du site.
La séance s’est terminée par un verre de l’amitié.
Toutes ces interventions ont donné à l’audience une excellente introduction aux nombreuses actions en vue de la compréhension du partenaire, sa culture et sa langue, à la suite de la signature du Traité de l’Elysée en 1963. Les participants ont également eu un aperçu d’une situation linguistique totalement différente, à savoir celle de la Suisse. Finalement ils ont vu comment, à l’aide des moyens modernes comme le web, on peut bâtir et structurer des ensembles d’informations qui pourraient être exploités par les enseignants de français et d’autres personnes qui s’intéressent au monde francophone.
Outre les interventions verbales, il y avait, dans la même salle, une exposition de matériel de promotion et d’enseignement, présenté notamment par l’OIF, l’Institut français, la Maison d’édition KLETT, l’OFAJ, Campus France, VdF Berlin, FranceMobil et la Ménagerie.
Des dossiers avec du matériel d’information ont également été offerts aux participants.
Deuxième jour :
Pendant la réunion du 17 avril, pour un public plus restreint, trois questions ont été débattues :
1. Quelles conclusions tirer pour améliorer la promotion du français et des cultures francophones ?
Cette discussion a montré qu’ il faut s’efforcer de présenter aux jeunes une image plus moderne, technologique, économique de la France que celle qui leur a été proposée jusqu’à maintenant. Mais il faut surtout élargir la perspective vers le monde francophone, car la France, pays voisin, « la vieille Europe », ne serait plus, selon certains, un pays assez exotique dans une société mondialisée. Certains intervenants ont trouvé qu’il n’y a pas assez d’information en Allemagne sur les possibilités que propose l’Université franco-allemande et qu’il faudrait la renforcer.
Une partie de la discussion s’est portée sur la possibilité d’adapter le programme de FranceMobil dans d’autres pays, comme la Norvège. Pourtant, un tel programme coûte cher, et les autres pays ne disposent pas de fonds de financement analogues à ceux d’Allemagne. Il a été mentionné qu’il existe un fond franco-allemand qui finance également des projets venant des pays tiers http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/LPS-N16-version_finalepdf.pdf
Une collaboration entre FranceMobil et DeutschMobil, a également été suggérée pour ces pays.
2. Quelles leçons tirer pour le développement et l’adaptation du site http://pourlefrancais.com ? Pendant la discussion de cette question, Mme Anttila a reçu des propositions utiles pour l’élargissement du site et pour l’adaptation à un public germanophone, la plus importante étant la création d’une page nationale sur l’Allemagne sous une rubrique « autres pays » à côté des pays francophones. Plus tard, des pages nationales analogues pourraient être ajoutées pour d’autres pays. Il a également été suggéré que les glossaires de l’OFAJ soient intégrés dans la page sur l’Allemagne. Mme Anttila a demandé à l’audience de lui envoyer des liens et du matériel qu’elle pourra intégrer dans son site, ce que plusieurs ont promis de faire.
3. Utilité d’organiser des séminaires analogues dans d’autres zones linguistiques, comme les pays latins non-francophones, ou dans des pays anglophones ?
L’audience a été positive à l’idée d’organiser des séminaires analogues et des pays ont été mentionnés dans lesquels cela pourrait se faire : la Grèce, les pays de l’Europe centrale, les pays baltes observateurs de la francophonie et les autres pays nordiques. Dans un tel cas, l’intérêt de l’OIF pour une coopération future paraît prometteur. Il a été suggéré que de tels séminaires soient liés à la semaine de la francophonie.
La deuxième journée s’est terminée par un déjeuner en commun.
Claude Anttila Turid Henriksen Rolf Tobiassen
Oslo/Helsinki, le 29 avril 2015